Toutefois(sin embargo, no obstante), le
débat ne s’arrête pas là. Au cœur de la discussion, se trouve
l’embryon : quel est son statut? La pression des patients qui
attendent une amélioration(mejora) de leur état,
et celle des médecins qui veulent toujours aider les malades en
détresse(desamparo, miseria), n’imposent-elles pas
une direction privilégiée au débat? Déjà, l’on constate la diversité
des règles interdisant ou autorisant les recherches(investigaciones)
sur les embryons surnuméraires non réimplantés après fécondation in
vitro ; c’est dire que les avis(opiniones) sur le
statut de l’embryon et sur la part de dignité et de respect qu’on
devrait lui attribuer sont encore très partagés(divididos,
repartidos).
Ainsi(de este modo), le statut de l’embryon
cloné change selon(según) que l’on considère que
son unique finalité est de devenir un être humain, ou qu’il est
possible de passer par cette étape éphémère(efímera)
du clone, uniquement pour élaborer des traitements.
Toutes les craintes(temores)
seront sans doute levées si l’existence de cellules indifférenciées
chez l’adulte(pertenecientes al adulto) est
confirmée. Si des cellules pluripotentes existent réellement dans
l’organisme, les clones non reproductifs n’auront plus à être
produits. Il suffira(será suficiente) de prendre
des cellules souches pluripotentes chez un adulte ayant une
dégénérescence nerveuse pour les cultiver et de les faire se
différencier en cellules nerveuses, lesquelles seront implantées
dans le cerveau malade.
Alors, si le clonage est encadré par la loi, par les responsables
éthiques ou par d’autres instances, mais s’il donne un avantage
important pour guérir des maladies dégénératives, il est certain que
les médecins chercheront à mettre en place des traitements par ce
biais. Pour eux, aucun interdit ne vaut, face à la possibilité de
sauver une vie. À charge ensuite aux hommes de loi et aux penseurs
de l’éthique de trouver les arguments pour expliquer leurs actes et
placer les limites. On est déjà passé, récemment, de l’interdiction
à la permission de faire des recherches sur l’embryon, dans un
contexte très surveillé.
Acceptera-t-on la constitution d’embryons humains, dans le cadre(marco)
du clonage, en excluant toute finalité reproductive? Ce serait là,
comme dans le changement de la définition de la mort, la preuve que
l’utilité scientifique et médicale est la valeur suprême en matière
de droit.
Sauver et aider une personne en danger serait notre premier
commandement(orden).
N’y a-t-il pas de limites? Cette fois, les hommes de lois auront, je
pense, à cœur de proposer des lois avant que l’acte médical ne soit
effectif plutôt que subir le diktat(imposición) du
fait accompli.
Ils ont encore le temps, car le premier clone humain (à finalité
reproductive ou thérapeutique) n’est pas pour demain.
Quant à la question de savoir si l’on pratiquera un jour le clonage
à visée reproductive(con intenciones reproductivas),
la réponse ne sera ni de la compétence des médecins ni de celle des
hommes de loi ; elle dépendra surtout(sobre todo). de l’idée que l’homme se fait
de l’homme.
Laurent Degos
dirige le Service d’hématologie de l’Hôpital Saint-Louis, à Paris.
Ce texte est extrait du chapitre
signé par l’auteur dans Les progrès de la peur, la Peur du progrès,
sous la direction de Nayla Farouki, à paraître en février 2001,
Éditions Le Pommier. |